Quand les cochons sortent - 19

Lorsque je me trouve près du marché des enfants rouges, je me souviens qu’une copine à moi, Eve, m’avait donné rendez vous avec d’autres copines il y a quelques jours, ou quelques semaines, je ne sais plus, dans un bar à côté, L’Astres Aux Notes. Je me dis que boire un verre avec d’autres personnes peut me faire du bien, respirer en dehors de l’ombre de Gustave, le temps d’un instant.

Je tourne à l’angle de la rue, et je l’aperçois.

Gustave.

En face de moi.

Là, à la terrasse du bar.

Je ne sais plus si je pleurais un peu avant ou si j’ai commencé  à pleurer à partir du moment ou j’ai vu Gustave qui embrassait une fille.

Je ne sais pas quoi penser quand Gustave s’approche vers moi. Il trébuche. Il a l’air terrorisé. Il essaie de me dire quelque chose, je crois… Je recule parce que je ne sais pas quoi penser… Gustave… mon petit Gustave… La fille qu’il embrassait se retourne pour le suivre du regard, elle ne me voit pas… Gustave… Eve…

Le monde s’écroule, je fais demi-tour et m’enfuis en courant. Je cours, mais j’ai l’impression de danser au milieu d’un tas d’immondices. Je ne me retourne pas et continue à courir. Ou à danser, cela n’a plus d’importance. Je m’enfuis. Loin, dans un endroit ou personne ne me verra pleurer, ou personne ne me regardera, ou personne ne me fera du mal.